Cet article propose des pistes pour créer un focus autour de l'arc narratif de la Vengeance. Il s'adresse aux meneurs. Si vous êtes un joueur, passez votre chemin car cela pourrait gâcher votre plaisir ! Pour en savoir plus sur le système des arcs narratifs et les focus, vous pouvez consulter cet article.
La campagne de Dearg propose quatre arcs narratifs majeurs et quatre arcs narratifs mineurs. Les quatre premiers bénéficient chacun d'un focus détaillé et un meneur pourra souhaiter en créer un nouveau, notamment s'il a 5 ou 6 joueurs à sa table.
Le meneur pourra s'appuyer sur l'un des quatre arcs mineurs : l'Ambition (en lien avec les Hilderins), le Regret (en lien avec les thématiques du Livre 0, prologue de la campagne), les Origines (en lien avec la culture Tarish) et la Vengeance. Dans cet article, je vous propose un développement autour de l'arc narratif de la Vengeance : c'est une motivation classique en jeu de rôle et la trame impliquée est relativement claire.
Les ingrédients existants
L'arc de la Vengeance est associé par défaut au prétiré Sìd le varigal. Son épouse a été assassinée et, sur les lieux du crime, un objet a été retrouvé et lui sert d'indice, apparemment un objet personnel de l'un des assassins. Au cours de sa traque, Sid est arrivé très mal en point aux abords de Dearg et a été sauvé par les PJ originaires du lieu.
S'inspirer du contexte de Dearg
L'épisode 1 de la campagne décrit les figures-clefs du val de Dearg, en particulier deux antagonistes charismatiques : le chevalier hilderin Argan et Rajen, le chef de la bande de brigand des Plumes noires. Les événements dramatiques de la campagne (épisodes 4, 5 et 6 essentiellement) vont impliquer ces protagonistes : le final de l'arc de la Vengeance aura donc lieu à ce moment et implique pour le meneur d'ajouter quelques rencontres et confrontations spécifiques.
Concevoir une histoire de vengeance
Pour une histoire de vengeance il faut :
1 - une relation intense avec un être cher
2 - une perte violente, brutale et injuste qu'il a été impossible d'empêcher
3 - un sentiment de priorité absolue et d'urgence
4 - un mystère quant à l'identité du ou des coupables
5 - la révélation d'un secret choquant supplémentaire (le "non seulement... mais...")
6 - un choix (tuer, épargner)
7 - une transformation (apaisement ou cynisme incapable de se libérer des morts)
Le focus permet de mettre en scène les étapes 1 à 4. Les 5 à 7 seront joués durant le final de la campagne.
Entremêler
Si on prend les composantes du cadre du val de Dearg, de l'historique par défaut de Sid et de la trame d'une histoire de vengeance, les scènes du focus deviennent assez simples à déterminer :
0. Qui est "Sid" ?
Puisque SÌd est par défaut un varigal, son début de formation et l'identité de son mentor peuvent être intéressantes à préciser. Cette phase pourrait faire un lien avec une option de l'étape 2. Pour le détail des aventures d'un varigal, le meneur peut s'appuyer sur le Livre 2 - Voyages et créer quelques péripéties voire rencontres de figures de Tri-Kazel.
1. L'histoire d'affection profonde de Sìd avec son être cher
Quelques modalités, péripéties, détails, pour donner corps à la victime. Qui est-elle ? A bien noter qu'un arc de la Vengeance peut avoir lieu pour punir toutes sortes de meurtre : il n'est pas nécessaire que Sìd soit un homme, ni que la victime soit son épouse. Il pourrait s'agir d'un frère / sœur, ami(e) d'enfance, de son père / sa mère, de son enfant...
Option modulaire surnaturelle : Sìd pourrait être hanté par le souvenir de la victime
- sur une modalité proche de celle d'Adeliane ; arc narratif de la Culpabilité (cf. Dearg Épisode 3)
- ou bien, comme dans le cas d'une hantise, auquel cas on a un lien possible avec l'arc narratif de l'Occulte, et le meneur pourrait mettre à profit le Manuel de la Lune noire autant que le supplément Occultisme.
2. La tragédie
Les modalités du crime sont à l'appréciation du meneur et dépendent du meurtrier choisi. La technique la plus simple est celle de l'indice menant vers l'un des criminels présents, qui peut n'être qu'un exécutant. Dans ce cas, le meneur a la possibilité d'aménager le mobile en cours de campagne :
- la victime n'était pas qui elle paraissait, elle avait de sombres secrets et agissait auprès d'un groupe criminel qui estimait qu'elle avait trahi ; un peu le modèle du film Kill Bill sauf que cette fois, le survivant serait le marié et non l'ancien assassin. La victime, si c'est une femme au passé mystérieux, être une "ex" du chef de la bande des Plumes noires par exemple. Avantage : plus de mystère et de révélations par la suite.
- la victime était au mauvais endroit au mauvais moment : témoin d'une transaction, d'un crime, poursuivie puis éliminée pour ne pas pouvoir dire la vérité. Avantage : facile à mettre en place à l'arrache
- la victime a été éliminée par accident à la place du PJ : dans ce cas en étape 1 du focus, le tenant de l'arc narratif de la Vengeance aura une enfance un peu aventureuse voire douteuse. L'un des membres importants de la bande des plumes noires est un varigal qui a mal tourné. Et si ce personnage avait été le mentor de Sìd ? ... Et si Sìd avait commencé à aider des criminels, par exemple les Roseaux de fer (cf. focus Gaol, Dearg Épisode 1)? Dans ce cas, en jouant le focus "arc de l'Amour" et "arc de la Vengeance" on aurait deux regards sur un même événements : hors de la bande et dans la bande. Avantage : mise en abîme, surprise à table en jouant le focus, complexification de la psychologie des "méchants".
3+4. La traque
Sìd arrive trop tard, ou bien survit de justesse à ses blessures s'il était présent. Dans tous les cas, il survit au meurtre de l'être cher et récupère un indice (la nature peut être choisie par le meneur). A peine remis, Sìd se met en quête des meurtriers. Manque de chance, quelque chose tourne mal. La nature de cet incident est au choix :
- Accident : mal remis, Sìd a pris des risques inconsidérés et a été sauvé non loin de l'endroit où il a perdu la piste. Avantage : relativement neutre sur l'économie de l'histoire, permet de mettre en scène les périls de la nature que même un varigal ne peut sous-estimer.
- Confirmation : nouveau combat contre ses ennemis qui croient cette fois le tuer pour de bon. Avantage : facile à mettre en scène. Inconvénient : risque de comique de répétition
- Coup de théâtre : un individu à ce moment inconnu de "Sid" intervient et le blesse sérieusement. Ce mystérieux ennemi qui a des vues sur Dearg sera l'un des intervenants des derniers épisodes de la campagne, qu'il soit malveillant ou simplement ambivalent (il y a le choix !).
Et à présent ?
La suite et l'issue dépendent des choix du meneur qui aura ainsi intégré un arc narratif "majeur" de plus dans sa trame !
Arc narratif de la Vengeance - Gawain
A cours de ma dernière promenade en forêt, j'ai ramené une pile de visuels pour me servir d'aide mémoire ou de base de réflexion pour des descriptions. Parmi elle, j'en ai trouvé trois qui me paraissaient être faciles à exploiter pour des feondas.
Pénétrer dans l'antre
Le trou que vous voyez doit avoir approximativement le diamètre de mon auriculaire. Il y en avait de semblables dans toutes la forêt, très typés, avec une entrée nette, pleine de soie presque semblable à du papier. Il me semble qu'il n'y a qu'à changer l'échelle pour trouver cette structure, ce repaire menaçant. Même s'il mesurait 20cm de diamètre et qu'il était très nombreux, ce serait dérangeant. Évidemment en encore plus gros, avec la possibilité d'entrer dedans, on a immédiatement un cadre anxiogène.
La bête
Il s'agit là d'une vieille souche arrachée, renversée, avec de l'herbe et des fougères et des vestiges de racines (surtout visible de l'autre côté de la butte, mais ça ne rendait pas en photo). On discerne aussi des blocs de pierres. D'après un panneau sur un sentier de randonneur, la forêt était une "arène granitique" (parsemée de rochers érodés, couverts de mousses et lichens).
Quand j'ai vu la souche, je me suis dit : "la tête difforme, une sorte de fourrure d'herbe sur les épaules, des bras larges..." Elle me faisait l'effet d'une sorte de géant à demi-enseveli.
Structure de terre noire
Je suppose qu'il s'agit de traces d'activité de vers de terre, mais elles étaient très nombreuses, situées en zone humide (terrain pré-marécageux si vous préférez) et d'une teinte très marquée. Il me semble que vouloir traverser un pré humide avec de telles structures, disons de 30 à 50cm de haut, éparpillées tout autour, pourrait être assez dérangeant.
Dans la série des sorties automnales et des prises de photo pour inspiration, voici un nouveau petit compte-rendu d'une journée en forêt et les liens vers les précédents :
- Une forêt de sapins, épicéas, hêtres, bouleaux et allouchiers (ou alisier ou sorbus aria) tapissée de mousse, myrtilles et fougères (
album de la sortie : toutes les photos, utilisables selon licence
creative commons si d'aventure vous trouviez un "truc" utile)
Toutes les photos ont été prises par mes soins avec les moyens du bord (mon smartphone, en attendant que j'apprenne à utiliser un véritable appareil photo!) et un jour très sombre, elles peuvent paraître désaturées : les couleurs réelles des mousses étaient plus vive. Si on augmente artificiellement la saturation de la photo on est souvent plus proche de l'effet visuel réel. Il demeure qu'un jour très gris, tout paraît bien plus terne que par un soleil éclatant.
Se perdre ou se cacher
Cette forêt était exploitée, comme en témoignait de nouvelles plantations au milieu de vastes clairières pleines de buissons de myrtille m'arrivant aux cuisses (même si je ne suis pas grande, ça reste quand même de gros myrtilliers !).
Dans un tel environnement, la vue peut porter loin car les sapins ont été plantés seulement à 3 ou 4m les uns des autres. Le résultat : un sous-bois tapissés d'épines de conifères et de mousses dans les zones assez claires. Comme les arbres ont dû lutter pour la lumière, poussant haut et bien droit, ils ont sacrifié toutes leurs branchettes inférieures :
Vous discernez ici le type de sol et l'état des branches lorsqu'elles restent attachées au tronc. C'est une différence importante entre le sapin qui pousse avec assez d'espace et surtout, de lumière : ce dernier a des branches inférieures vivantes et épaisses, de sorte qu'on peut grimper dedans. Là, avec des arbres plantés, poussant près les uns des autres et tous en même temps, les petites branches de la jeunesse meurent et prennent des allures d'ossements.
Si l'on l'exclut le relief (forêt en pente pour une bonne partie), l’œil pouvait voir jusqu'à une centaine de mètres par endroit. Par contre, les troncs d'arbres étant épais et très nombreux, il était assez facile de disparaître derrière et perdre de vue ses compagnons de marche.
Voici une vue de ce que donne cette même forêt dans les clairières (nombreuses, à cause, m'a-t-on dit de la tempête de 1999, mais je n'ai pas vérifié l'information)
De plus près le tronc prend l'aspect d'un sentier :
La vie colonise le bois mort :
La lumière touche le sol, très vite, le lichens et la mousse s'installent...
Les fougères prennent place (j'ai retrouvé mes amies de 1m à 2m, les même que dans l'autre sous-bois où j'ai testé le camouflage intégral en bord de chemin)
Bientôt de nouveaux arbres poussent à leur tour : la durée de vie d'une clairière est peut être de dix ans, guère plus.
Si en plus on est dans une zone humide (petit creux d'accumulation d'eau), on peut voir apparaître une végétation typique (mais il m'a été impossible de la photographier correctement à part quelques zooms)
Ci-dessous justement la sphaigne dont je connaissais le nom, mais que je n'avais jamais vu. Surtout, il s'agit d'une mousse blanche ou vert pâle ce qui est assez impressionnant :
De plus près avec sa petite bouille d'edelweiss :
Elle tapisse le sol avec une épaisseur de 5cm environ, un moelleux typique des forêts moussues, le bruit des pas est complètement étouffé. On m'a également parlé d'une espèce de mousse qui a un effet étrange : on marche, elle prend l'empreinte du pas, mais quelques minutes plus tard, toutes les traces ont disparu, la plante a repris son aspect d'origine comme si rien ne s'était passé.
Pour un prochain article, un petit complément spécial "j'ai trouvé des feondas" (ou ce qui pourrait être transformé en ces créatures).
Au commencement du dossier des mécènes, je prenais les commandes un peu comme elles venaient, en me demandant après coup comment les placer dans les ouvrages. Depuis l'automne 2013 où j'ai récupéré ce dossier, j'ai affiné la technique et mieux planifié. En concevant le projet "Forêt engloutie", j'ai développé des protagonistes et des rôles en pensant un peu à la manière d'un casting : besoin d'un seigneur, d'un conseiller, d'un cousinage ambitieux... Puis j'ai examiné toutes les commandes de figures et me suis appuyée sur les souhaits pour faire des propositions aux uns et aux autres.
Le seigneur Breth Mac Terfynisel... qui est décédé sur ma partie dans la Forêt engloutie... il a eu droit à des funérailles émouvantes ^^ Son héritière va de surprise en surprise.
Le barde Maelor, conseiller du vieux seigneur Breth
Le vecteur Fredelme, venu prêcher la bonne parole et n'ayant trouvé à se loger que dans une grange. Il garde le sourire et est convaincu que l'Unique l'aidera à accomplir sa mission : sauver les âmes des marais !
L'aubergiste Joavan, propriétaire de l'auberge du carrefour. Connu pour être près de ses sous alors qu'il est l'un des hommes les plus riches des environs. On dit que c'est un ancien varigal... mais comment diable serait-il devenu si fortuné ?
Le jeune neveu ambitieux, d'une branche de la famille dont le domaine est plongée dans les marais, héritier de terres pauvres, mais qui ne se laisse pas décourager...
L'oncle de l'héritier du marais, un homme qui a des accointances avec les seigneurs du duché de Tuaille...