Vous voulez proposer des canevas ou des scénarios ? (4)

9/19/2017 06:08:00 PM Iris 0 Comments

Je poursuis cette série d'articles consacrée à la création de scénario en proposant aujourd'hui un détour par la fonction de relecteur de fond. Pour faire aboutir un texte dans de bonnes conditions, il est souhaitable que l'auteur et le / les relecteurs de fond se comprennent bien et se fassent confiance.

La relation à la relecture de fond


Du point de vue de l'auteur, il peut être difficile de confier son texte à quelqu'un et recevoir des critiques pénibles ou des suggestions hors de propos. Pour être réussie, la relecture de fond doit cumuler certaines qualités.

Bienveillance


La bienveillance implique que le lecteur ne parte pas d'un a priori négatif, mais accepte l'idée que l'auteur s'est donné du mal et essaie de faire passer des idées qui lui tiennent à cœur. Le relecteur de fond va devoir s'exprimer sur un texte, une création de l'esprit, et donc un sujet sensible.

Sincérité


Il est tout autant nécessaire d'être sincère dans la relecture de fond. Un excès de bienveillance peut aboutir à trouver des excuses à toutes les faiblesses qui figurent, et au final, ne rien corriger ou pointer. La sincérité sans bienveillance est blessante, et peut donner lieu à des moments très difficiles pour l'auteur.

Compétence


On accepte d'autant mieux des critiques, des remarques ou des suggestions qu'on estime son lecteur compétent, et que ledit lecteur est lui-même lucide par rapport à sa maîtrise de tel sujet ou tel aspect. Un relecteur néophyte peut -- grâce à un regard neuf -- repérer des choses sur lesquelles d'autres ne réagissent pas ; un relecteur expérimenté repèrera sans doute plus de failles qu'un débutant. Au final, il n'y a pas un critère uniforme et absolu de compétence de la relecture.

En tant qu'auteur, posez-vous la question de ce que vous attendez de quelqu'un et n'hésitez pas à explicitez vos besoins en matière de retour. 

Demandez aux débutants s'ils comprennent tout ce qu'ils lisent et si tout est limpide, s'ils se sentent capables de mener le scénario rapidement après l'avoir lu. 

Demandez aux plus expérimentés s'ils voient des failles de structure, des moyens de mieux organiser les idées.

Modération


Le relecteur (fond ou forme) n'est pas là pour faire sien le texte d'un auteur. Il n'a pas vocation à obtenir un texte "pile dans ses goûts". Sa mission est d'accompagner l'auteur dans la démarche qui est la sienne.

Exemples : Le scénario Loch Varn (Livre 0 - Prologue) prend à rebours des habitudes de construction dramatique en semant une forme de confusion. Au contraire, "Une chambre bien rangée" (Occultisme) a un format chronologique classique et rationnel. Les approches des auteurs sont différentes dans les deux cas, avec une intention, plonger dans le doute, ou explorer l'anormal dans le banal. Des conseils de relecteurs visant à changer ces aspects seraient inappropriés puisque passant à côté du but recherché par l'histoire.

En tant qu'auteur vous pouvez aider les relecteurs de fond à vous comprendre à l'aide d'encadrés et de notes d'intention. Si vous voulez créer une histoire réaliste, les relecteurs de fond savent qu'ils doivent être à l'affût des éléments de cohérence qui seront fondamentaux ; à l'inverse, si l'histoire est à demi- onirique ou étrange, à la manière d'un Twin Peak de David Lynch, alors le bizarre n'est pas un défaut, mais un ingrédient clef. 

L'auteur doit parvenir à devenir suffisamment lucide sur sa création pour expliquer -- au moins quand elle est achevée -- le type d'émotion qu'il souhaite susciter. 

De son côté, le relecteur de fond doit en tenir compte pour orienter sa relecture en ce sens.

Pour en savoir plus...
- Proposer des canevas, partie 1
- Proposer des canevas, partie 2
- Proposer des canevas, partie 3
- Proposer des canevas, partie 5





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Vous voulez proposer des canevas ou scénarios (3)

9/14/2017 02:04:00 PM Iris 0 Comments

Je poursuis cette série d'articles (le lien vers le précédent) en rebondissant sur une discussion que j'ai eue avec un membre de la communauté qui me parlait de sa perception de l'écriture de scénarios. En particulier, il pointait les "carcans" des formats de scénarios "classiques". Au travers de ce débat sur les règles de présentation et le format d'écriture se pose celle de la légitimité desdites règles. Je pense que le fond de l'affaire revient à se demander : pourquoi écrit-on des scénarios ? Je parle ici des scénarios "du commerce", c'est-à-dire ceux destinés à figurer dans une publication. Mon analyse n'a pas prétention à couvrir tout le champ des réponses possibles, elle vise avant tout à expliciter mon attitude lorsque je m’attelle à une relecture de fond, et par là, ce que j'évalue pour estimer si le texte que j'ai est satisfaisant -- toujours et rigoureusement par rapport à cette question de la publication envisagée.

A quoi sert un scénario (du commerce) ? 


Un point fondamental : le scénario doit faire gagner du temps au meneur. Quand un meneur achète un scénario, il cherche à gagner du temps.

Corollaire : si vous aspirez à rédiger un scénario qui puisse être publié, il faut entre autre chose qu'il fasse gagner du temps, dans chacun des domaines évoqués ci après.

... certains meneurs sont aussi intéressés par le fait de voir comment les auteurs traitent un thème ou conçoivent des histoires dans une ambiance très typées, mais je vais laisser cet aspect de côté pour cet article. 

1. Réduire le temps de recherche


En premier lieu, le meneur s'épargne en grande partie ou en totalité le temps de recherche : documentation ; création de PNJ, de lieu et de créature. 

Il en découle que le scénario doit fournir une description suffisante des lieux et des protagonistes. Si l'histoire aborde un thème pointu quelconque, il doit être accompagné d'informations permettant au meneur de le mettre en scène.

Exemple : imaginons que vous avez comme situation dans le scénario une cueillette de champignons. Si vous n'avez strictement aucune idée du type de terrain, des difficultés, conditions ou saisons de ce type d'événement, la description sera non seulement pauvre, mais en sus, le meneur sera en difficulté pour répondre aux questions les plus simple de ses joueurs. Il peut aussi arriver qu'un joueur soit nettement plus qualifié que le meneur sur la question, et que la partie dérive vers des débats et discussions documentaires en délaissant le jeu.

2. Réduire le temps de préparation


Le meneur qui achète un scénario doit passer moins de temps à préparer sa partie que le meneur qui crée son histoire de A à Z.

Bien sûr, il y a toujours des meneurs qui souhaitent adapter un scénario pour mieux l'insérer dans leur campagne. Il est difficile de mesurer le temps que prendra l'insertion de modifications. L'auteur peut tenter de baliser certains cas de figure : motivations variées pour démarrer l'histoire, accroches variées associées à des PNJ. Cette facilitation est à mon sens souhaitable, mais il est impossible de couvrir tous les cas de figure. Sur le plan de la conception de scénario, l'idée est avant tout d'avoir une histoire dont le commencement n'est pas trop rigide pour rendre l'adaptation possible, et fournir un ou deux exemples peut aider.

Dans tous les cas, il faut s'assurer que le texte permet de comprendre facilement les enjeux, les tenants et les aboutissants, qui est qui, qui fait quoi, qu'est-ce qui est important et qu'est-ce qui est optionnel.

3. Réduire le temps perdu en jeu


Le scénario imprimé, éventuellement accompagné de ses aides de jeu (carte, fiches de PNJ, liste d'indices, etc.) est utilisé comme support de jeu. Pendant la partie, le meneur s'appuie sur sa mémoire pour certains aspects de l'intrigue, il se laisse porter par les réactions des PJ, mais il arrive inévitablement qu'il ait besoin de trouver rapidement une information.

Pour que ces phases de recherche soient les plus fluides et courtes possibles, il est essentiel que les informations soient faciles à trouver :

3.1. Utilisez des titres pour annoncer chaque bloc de texte 


Annoncez de longs paragraphes avec des titres donnant une idée de leur teneur

... sans quoi le meneur est obligé de tout lire... et quand il y a beaucoup de pavés, ça peut être long...

3.2. Rassemblement des informations de même nature


Rassemblez les informations de même nature au même endroit, et surtout pas éparpillé à plusieurs endroit.

Exemple : mettez tout ce qui concerne un PNJ clef (biographie, secrets, attitude...) au même endroit.

Si des informations doivent figurer en doublon (parce que vraiment ça s'impose), alors faites bien attention à ce qu'il existe une zone rassemblant malgré tout les informations pertinentes par catégorie. Au minimum, faites des renvois, qu'à la lecture on sache qu'il y a un endroit où tout trouver.

3.3. Pas de répétitions d'informations


Ne pas répéter plusieurs fois la même information est important : vous allégez le texte en limitant les redites. Vous faites des économies de signage et vous évitez que le meneur qui vous lit décroche en se disant "non mais ça je sais".

3.4. Utilisez les chapeau introductif pour résumer les idées clefs


S'il y a des principes généraux d'ambiance ou d'attitude s'appliquant par défaut à toute une scène ou tout un acte, notez-les directement au niveau du chapeau introductif, dans celui-ci ou dans un encadré dédié. Ainsi, le meneur, avec une lecture de survol rapide retrouvera ces notions importantes sans fournir d'effort.

3.5. La présentation type des scénarios d'une gamme


Certaines gammes, comme les Ombres d'Esteren, ont adopté un format de présentation des informations pour les canevas et les scénarios. Pourquoi ? Pour la même raison : le meneur qui connait cette présentation type sait où chercher les données. Le classement des informations dans la gamme Esteren n'est peut-être pas parfait ou optimal, mais il donne des repères, et ils permettent de s'y retrouver et naviguer plus facilement.

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Pour en savoir plus...
- Proposer des canevas, partie 1
- Proposer des canevas, partie 2
- Proposer des canevas, partie 4
- Proposer des canevas, partie 5




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